Quand j’étais petit, la Chine était une dictature. On parlait de camps de travaux forcés, de dirigeants corrompus alliés de l’URSS… Ça me faisait un peu penser aux histoires de mon grand-père sur l’Italie fasciste : ça me navrait et surtout, ça m’ennuyait.
Pendant quelques années, qui ont sans doute coïncidé avec la chute de l’empire soviétique, je n’ai plus entendu parler de la Chine. Et puis soudainement, l’image du pays à changer. On invitait des réalisateurs chinois à Cannes, Disney sortait Mulan, on s’est soudainement rendu-compte que nos jouets d’enfants venaient de là (« Made in China » pour un môme ça veut surtout dire que ça a été fabriqué au même endroit que le reste. Ça n’est qu’après qu’on se rend compte qu’on parle d’un pays manufacturier…).
Après, on m’a dit que la Chine était une menace. D’îlot dictatorial, elle était devenue à la fois un envahisseur industriel et un problème démographique mondial. Je me suis dit qu’ils devaient décidément être très inquiets, les messieurs de la politique, pour changer d’avis tout le temps comme ça. Progressivement et comme le reste, ce problème a été oublié.
Aujourd’hui, la Chine est présentée comme une grande puissance économique et on essaie de lui fourguer, avec succès, nos propres technologies (oubliant certainement que la Chine abrite les meilleurs reverse engineers du monde et que ce n’est qu’une question de mois avant qu’ils acquièrent les compétences nécessaires pour ne plus avoir besoin de nous). Les États-Unis y déversent leurs grandes marques en échange d’externalisation de leurs services, d’importation massives de produits pas chers et de touristes épuisants. Au passage, la Chine investit et se retrouve peu à peu propriétaire d’un des plus gros patrimoine financier gouvernemental du monde. La Chine est devenue si financièrement puissante qu’elle semble pouvoir acheter les droits élémentaires qu’elle bafoue, sans qu’aucun pays développés ne viennent l’en inquiéter.
Paradoxalement, les chinois sont toujours considérés comme des moins que rien. On les accueille avec des sourires mitigés quand ils viennent pour visiter, avec des contrôles de police quand ils s’attardent un peu (y compris quand ils sont français depuis 2 générations). Ils remplacent peu à peu les « ritals » et les « arabes » dans les discours xénophobes. Certains y voient la nouvelle invasion, pensant qu’ils surgissent de nulle part et oubliant que notre petit pays, nos petites entreprises et notre petite économie ne sont pas grand-chose devant une si massive population tournée (de force ?) vers un unique objectif de réussite économique.
L’image de la Chine a décidément bien changé depuis le temps où j’étais petit.