Nous sommes en voiture. Je freine et m’arrête pour laisser passer un homme et son petit chien au passage piéton. Ça interpelle mon aîné, attaché sur son réhausseur à l’arrière.
— Pourquoi tu s’arrêtes la voiture ?
— Pour laisser passer le monsieur et son chien, tu vois.
— Ah oui, un petit chien. Un tout petit chien.
Je sens à cette dernière phrase qu’il cogite… j’attends qu’il reprenne la parole.
Ça ne rate pas.
— Il est mort, le petit chien de Mamie, Bidule.
— Oui chéri, il est mort. Il était vieux.
— Sonam est mort aussi, un jour, plus tard.
— Oui chéri, c’est aussi un chien. Un jour, il sera vieux et mourra.
— Toi aussi est mort, un jour ?
— Oui mon cœur. Tout le monde vieillit et meurt un jour.
Il se met à pleurer, je comprends qu’il n’était pas prêt.
Je suis désolé, mon ange, ne t’inquiète pas. Tout va bien, Papa est là.
Rien n’y fait, je l’entends pleurer à l’arrière.
Chéri, tout va bien, il ne va rien m’arriver, tu sais. Je suis là, toi aussi : tu vois, nous ne sommes pas mort !
Je l’entends qui se calme, puis il explique :
— J’ai eu peur, Papa, je veux pas être mort un jour !
— Ne t’inquiète pas, chéri.
— Ah mais toi, tu peux est mort un jour, Papa.
— Ah, moi je peux mourir mais pas toi ?
— Oui, Papa. Toi tu es déjà vieux, très vieux !