Loin de stéréotype, cette interview du politologue Sebastian Roché est tout simplement passionnante. Il pose un regard objectif sur la Police, dénonçant certaines pratiques mais en expliquant les causes par ailleurs, sans accuser les individus. Il parle de minorités et des pratiques de l’Islam, mais aussi de la fatigue des forces de l’ordre et de l’abscence de considération du pouvoir politique.
[…] Il y a une coupure entre la population et les policiers, et cela est mauvais pour tout le monde.
[…] Il existe des opinions très mitigées voire hostiles à la police, un climat général plus favorable à des formes radicales d’agressions [pourtant] avoir la confiance de la population est aussi un bouclier pour les policiers.
[…] Dans plusieurs pays européens, des indicateurs de pilotage de la qualité de la police ont été mis en place. Une des raisons pour lesquelles il n’y a pas d’améliorations en France, c’est qu’il n’y a pas d’outil pour mesurer la qualité de la relation police-population.
[…] il y a aujourd’hui une absence de volonté politique de développer ces outils, le pouvoir politique est plutôt bien servi par la police.
[…] il y a un désintérêt du pouvoir central pour le service des citoyens. Le gouvernement est plus intéressé par la police du renseignement intérieur, du terrorisme (DGSI et DCRI) plutôt que par la police du quotidien, qu’il ne connaît pas.
[…] on constate qu’il y a en France un surcontrôle des minorités
[…] les agents qui se servent fréquemment du contrôle l’utilisent plus comme un outil de soumission que pour verbaliser
[…] Une partie de la solution tient à la façon dont les autorités décident de faire la police. Une autre dépend de la politique locale.
[…] En France, on forme beaucoup les cadres, donc les commissaires, qui ont tous un master et deux ans d’école. On forme finalement ceux qui en ont le moins besoin, puisque c’est l’agent qui va être au contact de la population.
[…] On se souvient que les récépissés de contrôle avaient été enterrés par Manuel Valls. Le management ne s’intéresse pas aux questions de discriminations.
[…] La période est effectivement très mauvaise pour répondre à la réforme de la sécurité publique. Les policiers sont très sollicités pour des tâches ingrates : gardes, patrouilles… La base est très mécontente. Le pouvoir politique est, lui, avant tout focalisé sur l’évitement des attentats avec, par exemple, le déploiement des militaires qui lui sert avant tout à se protéger.
« Si on ne veille pas à renforcer la cohésion, ça risque d’éclater », Sebastian Roché, propos recueillis par Paul Turenne avec Lucine Hugonnard
Au passage, je ne crois pas l’avoir dit ici mais je vous invite à vous abonner au Panier à salade. Vous recevrez chaque semaine une sélection d’articles sur l’actualité Police-Justice, issus de grands quotidiens ou de rédactions indépendantes constituées de journalistes.