À chaque fois que j’ai une discussion écologique avec des amis ou de la famille, se pose inlassablement la question de ce que nous faisons, les un
et les autres, au quotidien, pour moins polluer.Ma réflexion autour de ce concept est complexe. D’une part, je pense que cette notion de « petit geste quotidien » est entretenue par des gouvernements qui, par peur d’entreprendre des actions concrètes, décident de faire peser la charge psychologique de la lutte contre le réchauffement climatique sur les individus. Si la situation est la somme de nos petits égos individuels, alors la solution ne peut être que dans la morale et l’éthique de chacun, non ?
Bah non. Ces petits gestes, s’ils sont utiles et pertinents, ne sont qu’un premier échelon de ce qu’il faudrait faire, de ce qu’il faudrait entreprendre pour que la situation puisse… même pas s’améliorer, mais déjà arrêter d’empirer.
C’est un peu comme si on disait qu’on allait démanteler la Police et la Justice parce que les criminels savent que ce qu’ils font est criminel. Ça ne marche pas. On a à la fois besoin d’un cadre moral mais aussi d’une régulation active pour s’assurer que ce cadre est respecté.
Et ça ne s’arrête pas là : ce concept des « petits gestes du quotidien », dans ce qu’il exige de tout-un-chacun de choisir s’il y adhère ou non, entraine des comportements catastrophiques. Peu convaincues de la faisabilité de ces petits gestes et en colère contre cette logique culpabilisante, beaucoup de personnes décident tout simplement de ne faire aucun geste. Je parle bien de gens qui ont le choix, la situation économique et sociale leur permettant de l’exercer, et qui décident en toute conscience de ne rien faire, voire de participer à la dégradation du monde.
Ces personnes, qui ont les connaissances et les conditions matérielles pour changer leurs modes de consommation mais décident consciemment de ne pas se rapprocher activement d’objectifs de réduction de GES, ont leur part de responsabilité.
Cependant, elles n’existeraient pas si la force politique –toute la force politique, pas que les partis dits « écologique »– abordait ces sujets avec un discours d’action concertée.
En se reposant sur les épaules d’individus qui n’ont pas tous et toutes la force morale et les conditions matérielles pour porter cette responsabilité, les gouvernements successifs organisent cet échec collectif.